SS BRUGES
- Nom : SS BRUGES
- Type : paquebot
- Nationalité : anglaise
- Construction : Non Renseigné
- Propriétaire : Non Renseigné
- Dimensions : longueur 98 m - largeur 13,30 m
- Tonnage : Non Renseigné
- Motorisation : 4 turbines à vapeur Brown-Curtis développant 1462 cv. et entrainant deux arbres d’hélice
- Vitesse : Non Renseigné
- Armement : Non Renseigné
- Naufrage : Non Renseigné
- Coordonnées géodésiques : Non Renseigné
- Autres: Non Renseigné
(Le GALLIA - Ex CHATEAU-YQUEM - SISTER SHIP DU CHATEAU-MARGAUX) Reproduction Interdite - Extrait de la collection Marius BAR
Le Havre à travers la Seconde Guerre mondiale
La Seconde Guerre mondiale s’abat sur la ville le 19 mai 1940, avec le premier bombardement de la Luftwaffe sur le port et les quartiers environnants.
Comme en 1914, Le Havre est devenue dès le début du conflit une base anglaise. Depuis l’évacuation de Dunkerque (opération Dynamo), les troupes alliées et françaises sont refoulées de port en port où elles tentent d’improviser de nouveaux points de rembarquement face à l’avancée rapide de l’armée allemande.
Malgré quelques points de résistances héroïques çà et là, c’est la débâcle et la désorganisation dans les états-majors français.
A Cherbourg, la marine a réquisitionné des navires pour faire parvenir du ravitaillement et des munitions aux hommes pris en tenaille à Dunkerque. Dans le même temps, sur les plages nordiques, il n’est pas question de résistance mais d’évacuation. Les navires sont alors déroutés sur Le Havre, qui risque de devenir la prochaine poche : c’est l’embouteillage dans le port.
Parmi la population havraise, la terreur monte avec les plus terribles rumeurs de "l’ogre allemand" qui arrive. La vision des contingents britanniques qui les abandonnent n’est pas faite pour calmer l’atmosphère.
C’est justement l’objectif de l’aviation allemande : empêcher le réembarquements des troupes anglaises.
Le 4 juin, des bombes incendient une grande partie des docks, les sirènes des Stukas sèment quotidiennement un vent de panique grandissant sur la population. Les habitants affluent vers le port le 10 et 11 juin pour prendre d’assaut tous navires et embarcations susceptibles de les mener vers le Calvados, le Cotentin et même la Bretagne (comme si la Seine se présentait comme un rempart salvateur). Dans la rade, les paquebots en attente d’un emplacement à quai sont la cible des avions, le SS Bruges en sera l’une des victimes.
JOHN BROWN & COMPANY LTD (Clydebank)
Le 20 mars 1920, le chantier John Brown & Co. Ltd. de Clydebank (à proximité de Glasgow en Ecosse) lance un ferry, le SS Bruges de 2949 tonneaux brut, pour le compte de la Greast Eastern Railway. Une fois les finitions d’aménagement et les essais en mer réalisés, il est livré à sa compagnie en juillet.
Le navire est long de 97,84 m, large de 11,13 m et a une profondeur de cale 5,5 m. Il effectuera la liaison entre son port d’attache Harwich (Angleterre) et Anvers (Belgique).
En 1923, la compagnie G.E.R est rattachée à la la compagnie London & North Easten Railway (L.N.E.R.). Le ferry continuera jusqu’au printemps 1940 ses liaisons entre Harwich et la Belgique.
Affiche de la L.N.E.R. avec les navires assurant la liaison entre Harwich et les ports Belges (on y reconnait les silhouettes des ferrys et train-ferrys).
En 1920 et 1921 sont lancés ses deux sister-ships, l’Antwerp (2957 tx brut) et le Malines (2969 tx brut).
Affiche de la L.N.E.R. avec les navires assurant la liaison entre Harwich et les ports Belges (on y reconnait les silhouettes des ferrys et train-ferrys).
En 1920 et 1921 sont lancés ses deux sister-ships, l’Antwerp (2957 tx brut) et le Malines (2969 tx brut).
Le Maline
Ces trois navires peuvent transporter 430 passagers de 1ère classe, 1250 de 2ème classe et 500 tonnes de fret (ils disposent de 263 couchettes de 1ère classe et 100 pour la 2ème classe).
Avec sa belle silhouette et ses deux cheminées, le ferry SS Bruges est propulsé par quatre turbines à vapeur Brown-Curtis, développant 1462 cv et entrainant deux arbres d’hélice. Grâce à sa remarquable propulsion, il peut filer à 21 nœuds.
QUELQUES MOTS SUR LE CHANTIER DE CONSTRUCTION DES FRERES THOMSON
Les frères James et George Thomson ont fondé l'entreprise de construction navale écossaise de renom à Cessnock en 1851. Ils ont lancé leur premier navire, le Jackal, en 1852 et ce sont rapidement établis une réputation sur la construction de navires à passagers de prestige.
La société s’est installée sur la Clyde 1871, à Granges (plus tard rebaptisé Clydebank), près du village de Dalmuir, situé à la confluence de River Clyde et River Cart ; ce qui a permis de lancer de très grands navires.
En 1899, John Brown & Company Ltd, un fabricant d'acier de Sheffield, a repris le chantier et dès le début des années 1900 l'entreprise a innové en matière de technologie du génie maritime avec la turbine Brown-Curtis. Les performances de ses moteurs ont impressionné la Royal Navy, qui a passé des commandes avec celle-ci pour construire plusieurs navires de guerre.
Des navires célèbres furent construits par les chantiers John Brown : le HMS Hood, Tiger, Repulse et Barham, le Lusitania et l’Aquitania.
La compagnie a tout juste survécu à la dépression commerciale qui suivit la Première Guerre mondiale, grâce aux commandes des paquebots pour la Cunard White Star Liners : le Queen Mary et le Queen Elizabeth.
Au cours de la Deuxième Guerre mondiale, les chantiers ont grandement contribué à l'effort de guerre, entre autres par la construction des cuirassés Duke of York, Vanguard et du porte-avions Indefatigable.
CONSTRUCTION DU SS BRUGES
En 1920, le chantier lance le RMS Bruges de 2949 Grt, pour le compte de la Greast Eastern Railway, pour effectuer la liaison Harwich en Angleterre avec Antwerp en Belgique.
En 1923, la compagnie G.E.R est rattachée à la la compagnie London & North Easten Railway, L.N.E.R.
Attaque aérienne sur le port du Havre ! Le SS Bruges va s'échouer sur la plage
CONTEXTE
Les Allemands font leur entrée au Havre le 13 juin 1940. Ils vont l’occuper avec une garnison qui comptera jusqu'à 40 000 hommes.
L’armée du Reich va transformer la pointe de Seine-Inférieure (Seine-Maritime à parir de 1955) en base militaire retranchée : la Festung du Havre. Autour de la ville et du port stratégique va être édifié un large ensemble défensif, fait de casemates, fossés antichars, blockhaus et batteries d'artillerie. Ce dispositif s’intègre dans le Mur de l'Atlantique. La rade ainsi que l'estuaire seront défendus par des champs de mines.
De l’autre côté de l’estuaire, les batteries des fortifications du Mont Canisy, ouvrage du Mur de l'Atlantique, sont pointées sur le port du Havre pour parer à toute tentative de reprise du site. Dès le mois d’août, le port est transformé en un vaste lieu d’embarquement, en vue du projet de débarquement en Angleterre. Cette agitation portuaire va en faire une cible pour les bombardiers britanniques. Des raids nocturnes auront lieu presque chaque nuit à partir de 15 septembre, jusqu’à fin novembre (de nombreuses bombes perdues toucheront la ville). Le débarquement (opération Seelowe) sera finalement annulé fin 1940.
Pour les Havrais restés sur place, la vie quotidienne durant ces années d’occupation va être particulièrement difficile à cause des pénuries, de la censure, des bombardements, de la politique antisémite (le maire Léon Meyer sera contraint de quitter son poste à cause de ses origines juives). De nombreux Havrais vont continuer à quitter la ville.
Une résistance havraise se constituera autour de plusieurs noyaux comme le groupe du lycée du Havre, ou encore celui du Vagabond Bien-Aimé. Ces groupes vont participer au renseignement des Britanniques et à des actions de sabotage en vue du débarquement du 6 juin. Le 5 juillet 1944, un héros solitaire, Maurice Le Boucher, va mener une action de résistance spectaculaire en faisant sauter une réserve de munitions qui détruira définitivement la base sous-marine.
Au total pendant la Seconde Guerre mondiale, le port du Havre (qui abrite la 5ème et 6ème flottille de contre-torpilleurs, ainsi qu’une flottille de Schnellboots qui harcèle la nuit le trafic côtier aux abords des ports britanniques) va subir pas moins de 132 bombardements planifiés par les Alliés. Mais les destructions les plus importantes (et hélas sans doute les plus inutiles) surviennent les 5 et 6 septembre 1944, à la veille de l’assaut, lorsque les Alliés déversent un tapis de bombes sur le centre-ville et le port pour affaiblir l'occupant (opération Astonia). En effet, de fausses informations indiquaient qu’une garnison encore importante restait cantonnée en ville, aux abords du port. L'objectif allié est de faire tomber rapidement la forteresse du Havre et surtout de récupérer son port, afin de faciliter le ravitaillement et la progression des troupes alliées qui, débarquées trois mois plus tôt en Basse-Normandie, se trouvent maintenant en Belgique, mais dont l'approvisionnement depuis Cherbourg est trop tendu.
Le bilan de l’ensemble des bombardements du conflit pour la population de ville est lourd : 5 000 morts (dont 1 770 en 1944), 80.000 sinistrés, 150 hectares rasés, 12.500 immeubles détruits. Le Havre aura reçu 10 % du tonnage de bombes largué sur la France.
Les derniers combats cessent le 13 septembre 1944. Les occupants ont préalablement détruit les infrastructures portuaires, miné le port et coulé des navires, ce qui devrait rendre les bassins inutilisables un bon moment après leur départ. Ce sera sans compter sur le Génie américain qui montera des installations provisoires permettant d’accueillir les premiers Liberty Ships dès octobre (la reconstruction durera jusqu’en 1964).
Le Havre après les bombardements - Collection privée Thierry DESPRES
Le port était détruit à 95 % et quelques 350 épaves jonchaient les bassins et la rade.
Parmi ces épaves, figurent notamment le Niobé et le SS Bruges dont voici l'histoire...
Le 11 juin 1940 est une journée terrible dans l’histoire du Havre. L’ennemi est aux portes de la ville. Les raffineries et les stocks de carburant ont été incendiés afin de ne pas les laisser aux mains de l'ennemi.
La seule issue pour tenter d’évacuer la cité devant l’avancée allemande est la mer, pour aller « de l’autre côté ». Dans un désordre indescriptible, les habitants de la ville vont tenter d’embarquer sur tout ce qui flotte pour gagner les côtes du Calvados, encore libres à ce moment. Un raid de l’aviation ennemie va transformer l’exode en drame. De nombreux navires sont envoyés par le fond et Le Havre pleure des centaines de victimes.
Le ferry britannique SS Bruges qui a été réquisitionné pour servir de transport de troupes vient d’arriver de Portsmouth. Il attend son tour en rade du Havre pour avoir l’autorisation d’entrer au port, afin d’embarquer militaires et civils qui tentent de fuir. Il n’y arrivera jamais. En milieu de journée, il est touché par plusieurs bombes, alors qu’il se trouve à deux milles de la côte, entre Cauville et Saint-Jouin-Bruneval.
La vedette de pilotage Sénateur-Louis-Brindeau est en service au large. Elle participe activement au sauvetage de centaines de rescapés, dont les bateaux ont été victimes du raid allemand. Elle dépose en début d’après-midi un pilote, Emile Prentout, à bord du SS Bruges. C’est par son rapport que la fin du navire serat bien connue.
Lorsqu’il monte à bord, le pilote trouve un incroyable désordre sur la passerelle. Mais comme la barre et la machine fonctionnent, à 15h15, il prend la décision avec le commandant, d’essayer de rentrer le bateau au port afin de le sauver. La manœuvre est difficile car l’avant est en partie immergé. Afin de pouvoir s’échouer au rivage le cas échéant s'il n’arrivait pas à rallier les bassins portuaires, le SS Bruges longe la côte au plus près, à environ un demi-mille.
Arrivée en petite rade, sous la protection des forts de La Hève, l’attaque aérienne terminée, cinq blessés sont transférés à bord de la vedette Sénateur-Louis-Brindeau. Elle les conduira sur le navire hôpital Worthing (*) mouillé en grande rade.
Alors que le navire va se signaler pour recevoir les ordres, l’officier chargé de surveiller la voie d’eau informe la passerelle que le bateau coule.
A 17 heures, le commandant et le pilote Emile Prentout dirigent le bateau vers Sainte Adresse afin de l’échouer en douceur devant le Palais des régates.
(Le SS Bruges échoué sur une plage du Havre - Photo Collection Jean-Paul DUBOSC)
L’ancre tribord mouillée, l’équipage regagne la plage sur une des embarcations du navire. Pour son action durant ces journées, le pilote recevra la Croix de guerre et celle de Chevalier de la Légion d’Honneur (la station fut-elle aussi décorée ?).
Quant à l’épave, reposant bien droit sur sa quille, elle servira de cible d’entraînement aux artilleurs allemands.
De nos jours, les quelques restes du navire reposent sur un fond d’un mètre à marée basse, et de sept mètres à marée haute, à environ trois cents mètres du rivage.
Bien qu’elle ait été arasée dans les années 1980 pour la sécurité des véliplanchistes, par grande marée, quelques tôles sont encore visibles de la plage.
Pour les plaisanciers, l’épave est facile à repérer car balisée par deux cardinales : Sud et Nord. Une personne rencontrée récemment raconta une anecdote surprenante : Il avait loué, avec un groupe d’amis, un voilier avec skipper pour le week-end. De retour vers le port, ils longeaintt la côte, profitant de la bonne brise, quand le voilier stoppa net ! Il était passé entre les bouées et sa quille venait de taper l’épave… Les passagers contusionnés par le choc furent bons pour la minerve… Le SS Bruges ferait encore des victimes ? Toujours est-il que c’est par le site du GRIEME que cette personne découvrit l’origine de l’obstacle.
Encore fréquentée par les plongeurs il y a quelques années, l’épave est aujourd’hui désertée. Il ne reste que des tôles informes dans une eau extrêmement trouble. L’usure du temps et des éléments aura bientôt définitivement rongé ce patrimoine de guerre. Au travers de ce navire, il nous appartenait alors faire redécouvrir cet épisode du 11 juin 1940, pour que sa trace se prolonge dans les mémoires.
Personnellement, j’ai passé mon enfance à Saint-Adresse. Autant vous dire que les journées à la plage, je connaissais. Avec les copains, nous guettions à l’horizon la fumée annonciatrice de l’arrivée d’un grand paquebot dont la vague d’étrave nous promettait trois énormes rouleaux.
Quand la marée était basse, parfois le soir, mon père nous rejoignait après son travail pour arpenter les flots avec son « pousseux à crevettes ».
En arrière-plan, émergeaient ces drôles de tôles et poutrelles tordues. Qu’était-ce donc ? Jamais ni lui, ni personne n’a pu m’apporter de réponse à l’époque. Puis j’ai rejoint Rouen, laissant derrière moi le mystère de ce grand navire échoué loin du chenal (les prémices, très jeune, de ma fascination future pour les épaves).
Presque 40 ans plus tard, j'ai enfin plongé dans cette passion du patrimoine sous-marin et, en rejoignant le GRIEME, j’ai enfin découvert au travers des recherches des copains l’histoire et le nom de ce navire sur lequel je me suis souvent écorché les pieds.
Témoignage de Jean-Luc Lemaire (Président du GRIEME)
SITE DU SS BRUGES
Cliquez ici ou sur l'image pour lancer le film (Réalisation Thierry DESPRES)
LA DEUXIEME MORT DU SS BRUGES
L’épave a fait le bonheur des premiers plongeurs au Havre, à 300 m du ponton du nouveau Palais des régates, les restes reposants dans 1 à 6 mètres d’eau, face à la plage.
Mais en juin 2002, il est décidé de supprimer les quelques espars émergeants à marée haute, car constituant encore un réel danger pour la navigation de plaisance.
Seules restent en place, les deux balises cardinales Nord et Sud rappelant l’endroit où l’épave se trouvait et quelques moignons de tôles visibles lorsque la mer se retire lors des grandes marées.
VESTIGES DU SS BRUGES QUELQUES ANNEES PLUS TARD, UN JOUR DE GRANDE MAREE
Clichés pris le 18 février 2011 - Marée basse vers 18h00 - Photos de Thierry DESPRES
Extrait du journal régional Liberté Dimanche - Article de Lionel Cailles (1997)
Dès la fin des années 1990, trois des 12 membres fondateurs du GRIEME se sont intéressés aux épaves de la Côte d'Albatre.
C'est ainsi qu'au cours de l'année 1997, Lionel CAILLES (à droite sur la photo ci-contre, en compagnie de François Mathieu, Yvon Chartier, Franck Pinéranda et Julien Morvan), journaliste à Liberté-Dimanche et amateur de plongée sur épave, a rejoint le petit groupe de "fous furieux" d'épaves contemporaines qui oeuvraient au sein de la Commission Archéologie du CD 76 avant de co-fonder, avec d'autres compères, ce qui allait devenir le GRIEME (Voir chapitre sur la fondation de notre association).
Le Bruges fait partie des épaves dont le journal régional Liberté-Dimanche a régulièrement publié le récit, que vous pouvez retrouver en intégralité sur cette page, mais également dans le Tome 1 de la Saga des épaves de la côte d'Albâtre, ainsi que dans le fascicule La Saga des épaves du Pays de Caux Tome 1 (épuisé à la vente).
C'est ce devoir de mémoire et le désir de raconter l'histoire des épaves du littoral de La Manche-Est, mais également de Bretagne, de Méditerranée, voire même plus loin, que le GRIEME a inscrit dans l'esprit même de ses statuts. Dans cette perspective, la rencontre avec des témoins, des survivants, de la famille des victimes des naufrages, dont nous racontons l'histoire, reste une phase fondamentale qui est présentée ci-dessous avec deux témoignages de Havrais qui vécurent le dramatique mois de juin 1940.
DEVOIR DE MEMOIRE
Le Havre après les bombardements - Collection privée Thierry DESPRES
Voici le témoignage d’un habitant ayant vécu cet exode
"De l’évacuation du Havre en Juin 1940, je ne me rappelle pas de beaucoup de choses :
Nous étions entassés sur les quais à attendre pour embarquer sur les barques de pêcheurs. J’étais avec mes parents, mon frère de 7 ans, et moi âgé de 8 ans.
Nous avons réussi à embarquer ; mon père est resté au Havre, il était gérant d’un magasin de pièces détachées pour automobiles et ne pouvait quitter Le Havre, de peur du pillage.
A peine étions nous partis du quai, que nous avons été mitraillés par les avions allemands, deux avions en rase-motte. Au premier passage, une grande partie des personnes embarquées se sont précipitées à bâbord. A tribord nous nous étions tétanisés et, en voyant le bateau pencher dangereusement, le marin pêcheur a hurlé : « N’allez pas tous du même côté, nous allons couler ! »
Tout le monde repris sa place et, lors du deuxième passage, plus personne n’a bougé.
Peu de temps après, nous avons entendu une énorme explosion. En débarquant à Honfleur nous avons appris que le Niobé avait été coulé, sans plus de précision.
Nous avons continué notre chemin, ma mère avec une valise et nous avec un petit sac qui, vraisemblablement, devait contenir quelques jouets.
C’était début Juin, il faisait un temps splendide, beau et chaud, je m’en souviens car moi la chaleur me provoquait toujours des saignements de nez. Donc, moi la tête en l’air et le mouchoir sous le nez, nous avons continué notre route.
En fin d’après-midi, nous avons été accueillis par des gens qui nous ont hébergé pour la nuit et nous ont promis qu’une camionnette nous conduirait plus loin le lendemain matin. Notre voyage a pris fin à Juaye Mondaye, à proximité de Bayeux, dans une petite maison que des fermiers nous ont aimablement prêtée.
Mon père est venu nous chercher quelques temps plus tard, et c’est seulement en rentrant au Havre que nous avons appris la mort de mon institutrice de maternelle de l’école Louis Blanc, madame Mercadier. Elle avait péri sur le Niobé. Dans mon souvenir d’enfant, je la revois toujours, grande, brune, avec (très curieusement) une blouse à grands carreaux roses et blanc ; est-ce un rêve ou une réalité, je ne le saurai jamais."
Témoignage de «Nizou» Quelque part du côté du Havre
REMERCIEMENTS & SOURCES
Wikipedia
Le Havre Presse
Mairie du Havre
Thierry Despres (plongeur havrais Paul Eluard et Président du GRIEME)
https://en.wikipedia.org/wiki/SS_Bruges
http://www.lrfoundation.org.uk/public_education/reference-library/register-of-ships-online/
https://en.wikipedia.org/wiki/London_and_North_Eastern_Railway